Les origines de la 10e Escadre de Chasse, le 1er avril 1951, sont placées sous le signe des centres d’entraînement des réservistes (CERA) de Villacoublay et Rabat. Mais l’Histoire de la 10 se simplifie relativement à partir de son arrivée sur la base aérienne de Creil le 1er juin 1954.
Avec la dissolution des escadrons 1/10 et 2/10 sur Thunderbolt et Vanneau, le seul escadron constitutif de la 10e EC est en pratique l’escadron d’entraînement et de calibration 2/17, avec ses escadrilles SPA 84 et SPA 93. L’EEC 2/17 vole sur Vampire (immatriculation en 17-Xi). Ce n’est qu’en juillet 1956, que le 2/17 Valois rejoindra officiellement la 10e EC.
Le 4 octobre 1954 voit la création administrative des escadrons 1/10 Parisis (escadrille SPA 99 Pégase, noir ou blanc) et 2/10 Seine (SPA 76 et Cercle de Chasse de Paris). Le 1/10 possède 16 Vampire au 30 juin 1955. Au cours de cette même année 1955 arrivent à Creil les Dassault Mystère IIC, précisément le 13 juillet, l’avion n°13 est affecté au 1/10 et codé 10-LA.
En fin d’année 1955, le 1/10 a touché 16 Mystère, tandis que le 2/10 Seine en possède quatre. Le 2/17 vole toujours sur Vampire. L’escadron de chasse 3/10 Aunis est créé le 1e mars 1956, touche quelques MD.452, puis reprend les armes du 2/17 dès le 31 juillet, devenant EC 3/10 Valois.
A la fin-août 1956, nous avons donc une 10e Escadre constituée des EC 1/10 Parisis (SPA 99 – avions codés en 10-Li), 2/10 Seine (Cercle de Chasse de Paris, avions codés en 10-Rj) et 3/10 Valois (SPA 84 et 93, avions en 10-Sk) et volant sur pas moins de 84 Mystère IIC. Bien que le MD.452 ne soit pas dénué de qualités, il est considéré comme ‘peu sûr’ et sa gourmandise en carburant (réacteur ATAR 101D) rend son utilisation délicate. Le 21 novembre 1957, ces premiers Mystère sont interdits de vol.
La période suivante voit la transformation du 2/10 Seine sur Mystère IVA en décembre 1957, et la dissolution du 1/10 Parisis le 1e février 1958, l’escadron 3/10 devenant EC 1/10 Valois. C’est à partir de cette date que les immatriculations des avions de la 10 sont inversées par rapport aux numéros des escadrons.
Tandis que le 2/10 poursuit ses vols sur Mystère IVA, le 1/10 va se transformer sur Super Mystère B2, ce qui est fait le 28 mai 1958, date à laquelle le premier SMB2 se pose à Creil. La 10 est la première escadre à voler sur le Super Mystère, chasseur supersonique, devançant la 12e EC. Les pilotes du 2/10 sont transformés progressivement sur SMB2 au cours de la même année, le dernier Mystère quittant Creil le 20 janvier 1959.
De 1959 à 1968, les B2 font les beaux jours des deux escadrons de la 10. Le 1/10 Valois vole sur des B2 parés de la flèche bleue (immatriculés en 10-Si) et le 2/10 Seine en avions munis de la flèche rouge (codés en 10-Rj).
Deux escadrons qui sont complétés par un troisième à compter du 1e octobre 1961 : l’escadron de chasse tous temps 1/30 Loire en provenance de Tours. Cet escadron équipé de Vautour IIN quittera la BA 110, et la 10, en mars 1965.
C’est le 24 janvier 1969 que les premiers Mirage IIIC de la 10, ceux du 2/10 Seine, se posent à Creil en provenance d’Orange. Cette année 1969 voit aussi apparaître à Creil les premiers SMB2 camouflés, en trois tons bien délimités, style Vietnam !
De 1969 à 1974, la 10e Escadre possède deux escadrons de chasse, l’un volant sur SMB2 (le 1/10 Valois) et l’autre sur Mirage IIIC (le 2/10 Seine). Ce qui ne l’empêche pas de cartonner en terme d’activité : 10 000 heures de vol en 1972 …
Evénement oublié et insolite, l’EC 2/10 Seine sera la première unité de chasse française à poser ses avions en territoire soviétique, du 20 au 26 mai 1971, à Domodievo … privilège du Mirage. En septembre de la même année, les avions russes rendront la politesse en visitant le Neu-Neu et ses vénérables Vautour !
C’est le 26 juillet 1974 que s’achève l’ère du B2 au 1/10 et à la 10, après 116 000 heures de vol environ: le Valois est en effet transformé sur IIIC.
Ainsi, de 1974 à 1981, la 10e Escadre fonctionne à nouveau avec un seul type de chasseur. Les deux escadrons deviennent les dernières unités à utiliser les Mirage de première génération.
Les Mirage IIIC retrouvent d’ailleurs un air de jouvence à partir de 1976, avec la peinture ‘bleue défense aérienne’ analogue à celle des F-1C.
A partir du 1er septembre 1978, la 10 retrouve un format à trois escadrons, avec la création du 3/10 Vexin stationné à Djibouti, en remplacement du 4/11 et de ses F-100.
Ces IIIC un peu spéciaux (ils pourront emporter le Magic à la place du Sidewinder) reçoivent un camouflage ‘vanille-chocolat’ qui se changera bien vite en ‘vanille-café’.
Réminiscence des origines de la 10e EC, les avions du 3/10 sont codés en 10-Lx; leurs traditions sont par contre celles des ERC 3.561 et 4.561 de 1939-40.
A compter du 28 septembre 1981, la 10e escadre de chasse de Creil redevient ‘mixte’ avec un escadron, le 1/10 Valois, volant sur F-1C, et le second récupérant tous les Mirage IIIC.
Le 3/10 continue, bien entendu, à user les IIIC sous les cieux de la corne de l’Afrique. Mais les vénérables delta ne sont pas finis, preuve en est, le 2/10 remporte la coupe CAFDA à Solenzara.
L’année 1984 voit l’arrivée des 2000 dans l’Armée de l’Air, il est décidé de réduire un peu la voilure de la défense aérienne en se séparant des avions les plus anciens.
Le 1er avril 1985, le 1/10 Valois et ses F-1C fait un petit saut vers l’Est : rejoignant la base aérienne 112, il mute en EC 1/30 Valois.
L’ EC 2/10 Seine va accompagner la 10e Escadre jusqu’au 31 mai 1985, date de sa dissolution officielle. C’est aussi la fin des IIIC en métropole.
Toutefois, l’esprit de la 10 fit de la résistance grâce aux Mirage IIIC de Djibouti : jusqu’au 30 juin 1988, les Mousquetaires du 3/10 Vexin continueront leur mission dans les cieux de ‘La Corne’ arborant fièrement le n°10 … En 1986, le nombre d’avions disponibles passera de 9 à 11, le nombre de pilotes augmentant également.
A compter de mi-86, le Vexin prit acte de la dissolution de la 10e Escadre et immatricula ses Mirage en ‘3-10 Lx’. Quatre d’entre eux rejoindront la métropole en mi-juin 1988, alors que les sept autres effectuèrent un ultime vol retour depuis le terrain d’Ambouli, le 11 août 1988.
Mais ce n’est que le 27 juin 1994, à Reims, lorsque le 1/30 Valois fut dissous et ses escadrilles remisées, que le cercueil de la 10ème escadre de chasse fut définitivement enfoui.
Les escadrilles SPA 84 et SPA 93 ont de nos jours trouvé de nouveaux hôtes prestigieux, mais il faut désormais beaucoup de chance (*) ou de très bons yeux pour les voir figurer sur une dérive d’avion.
Quant au superbe Coq du 2/10 …, il n’y a plus de réacteur pour le faire chanter …
(*) Un Mirage 2000C du 2/5 Ile-de-France porte actuellement un magnifique renard de la SPA 84 sur la dérive (c’est le n°84 !).
Copyright: Alexandre et escadrilles.org, avec la participation de Christian Boisselon, Michel Cristescu, feu Jacques-Yves Ezéquel, Alain Gréa, Jean-François Lipka et Eric Moreau pour les photos.
Remerciements: Que le colonel Danis et le colonel Brugnon, commandant la Dix en 1977 et 1984, trouvent dans ce petit historique l’expression tardive de notre gratitude. Il est si facile de dire ‘non’ – ou, pire, de ne pas répondre – quand on reçoit une demande de civils pour une visite ‘photo’ et que l’on commande une grande unité !
Source: La 10e Escadre de Chasse (Brugnon & Moreau, 1984 ; Siniscalco pour le tableau chronologique détaillé de la 10e EC)