La base aéronavale de Landivisiau, parfois surnommée le ‘porte-avions de granit‘, organise ce 56e Tiger Meet avec la 11e Flottille de Chasse Embarquée.
Compte-tenu de la localisation géographique et de la nature des unités présentes, les COMAO (Combined Air Operations) peuvent s’organiser selon deux thématiques: une aéro-maritime, et une aéro-terrestre.
Un briefing du commandant de la BAN, le CV Pascal Cassan, assisté du pacha de la 11F et de l’officier référent NTM au sein de la flottille, a permis de lever légèrement le voile sur la nature des exercices.
Pour satisfaire au réalisme des COMAO aéro-maritimes, le NTM bénéficie de la présence au large de trois frégates: la FREMM Aquitaine, la HMS Duncan, et la frégate néerlandaise De Ruyter.
Pour ce qui est des exercices aéro-terrestres, le NTM met en jeu l’escadron de défense sol-air de St-Dizier (missiles Mamba et Crotale NG), ainsi que des JTAC (Joint Tactical Air Controler) et des éléments du 16e Bataillon de Chasseurs.
Le contrôle et le commandement aériens des exercices sont assurés par des E-3 du 36e EDCA (Avord), de l’OTAN (Geilenkirchen), un E-2C de la flottille 4F, et un Sea King AEW du Sqn 829 de RNAS Culdrose.
Cet ensemble de moyens tactiques garantit la haute valeur ajoutée de ce NATO Tiger Meet, permettant à toutes les unités de s’engager à leur niveau le plus élevé dans une ambiance d’opérations combinées au standard de l’OTAN.
Chacune d’entre elles a désigné des équipages au plus haut niveau de qualification, dont au moins un ‘Mission Commander’ OTAN. Les unités peuvent travailler sur leur inter-opérabilité et utiliser la liaison 16 au mieux de ses possibilités.
L’organisation opérationnelle du NATO Tiger Meet est toujours un peu délicate, le club des Tigres incluant des unités de pays non-OTAN (la Suisse et l’Autriche). Pour cette raison d’ailleurs, l’exercice se voit attribuer le statut ‘NATO unclassified’.
Si le Tiger Meet revêt quelques aspects festifs, il est organisé pour améliorer la préparation opérationnelle des unités. Chacune d’entre elle a d’ailleurs transmis au référent ‘NTM’ de l’unité hôte, la 11F, ses souhaits pour l’intégration d’aspects opérationnels particuliers.
De plus, en cette année 2017, un contenu air-air soutenu était également souhaité par plusieurs unités OTAN impliquées dans la guerre contre Daech: dans ce conflit en effet, ce sont principalement les aspects opérationnels air-sol qui sont pratiqués, au détriment du niveau de préparation air-air.
Bien que les parkings de Landivisiau ne soient pas ceux de Zaragoza (une ex-base US), le nombre d’unités participantes permet d’organiser des COMAO de 50 aéronefs environ (40 jets et 10 hélicos).
Rappelons que contrairement au TLP, le Tiger Meet voit le scénario des COMAO changer tous les jours. A Landivisiau en 2017, chaque pilote ou équipage a l’occasion d’effectuer une mission chaque jour.
Lors des deux semaines d’exercice, chaque unité OTAN a la possibilité d’exercer le leadership de la COMAO. Toutes les unités passent dans le camp bleu et dans le camp rouge (un escadron peut d’ailleurs avoir un élément engagé chez les Bleus et un autre chez les Rouges).
Cette alternance de rôle demande un travail intense de tous les navigants (au nombre de 150). La préparation de chaque COMAO est d’abord commune, mais se déroule ensuite de manière séparée pour la Red Force et la Blue Force, naturellement. Pour les debriefings, un ‘mass debrief’ d’une heure se déroule immédiatement après le retour de la COMAO.
Durant le NTM de Landivisiau, les hélicoptères sont particulièrement bien intégrés aux COMAO, dans les forces bleues et rouges, tant dans des missions de reconnaissance ou d’attaque que dans celles d’insertion de commandos ou de RESCO (récupération d’équipages au combat).
Dans un tel exercice, comme en opérations, la fonction des ‘officiers rens’ est primordiale pour non seulement préciser à chaque camp la nature des menaces attendues du camp adverse, mais aussi pour inculquer à chaque partie les éléments de doctrine opérationnelle de l’adversaire.
Quel pourrait être le scénario d’une COMAO aéro-maritime lors de cette session bretonne du Tiger Meet ? Comme cadre stratégique, on peut parfaitement imaginer l’incursion d’une force maritime ‘rouge’ au voisinage des côtes du pays ‘bleu’.
Le Sea King AEW pourrait donc procurer le contrôle aérien au groupe maritime rouge, qui serait protégé par une patrouille de Rafale Air. Le Hawkeye 4F jouerait le même rôle pour la force bleue. Il serait protégé par 4 F-18C (suisses).
Les Bleus pourraient alors lancer un strike anti-surface sur la force rouge, avec par exemple 4 Rafale Marine, accompagnés par une force ‘protect strike’ comprenant 8 avions, dont 2 Typhoon et 6 F-16 MLU (belges).
Les Rouges lanceraient alors une force ‘counter air’ composée de 8 avions, comme par exemple 4 Gripen, 2 F-16 et 2 Rafale Air. Chaque partie bénéficierait d’un plot RESCO (AB-212 + Tigre).
Pour une COMAO de type aéro-terrestre, on imagine une force rouge en progression sur une portion de territoire bleu. Cette force bénéficierait d’une protection SAM qui génère un niveau de menace élevé, et d’une CAP composée de 4 F-16 (Klu). Elle serait appuyée par une composante CAS (SAAB 105).
Les Bleus pourraient envoyer des éléments d’hélicoptères de combat (Gazelle) pour contrer la progression et insérer des commandos sur l’arrière des Rouges (Merlin NAS 814). Ces hélicos de combat bénéficieraient de la protection de 4 RFM.
Simultanément, les Bleus pourraient lancer un strike ‘entry force’ pour éliminer les défenses sol-air des Rouges (4 Rafale Air). La force de ‘protect strike’ pourrait compter 4 F-18C.
Pour contrer ce strike, les Rouges pourraient alors lancer une force air-air composée de 8 avions, des Typhoon et des F-16MLU (Faé).
Cette fois, compte-tenu de la forte menace sol-air en zone rouge, les Bleus bénéficieraient de deux plots Resco AB-212/Tigre. Et deux patrouilles simples de Gripen pourraient assurer la protection des RESCO.
Avec un décollage étagé à partir de 9h30, cela donne un ‘play time’ d’une heure (entre 10h et 11h00), et un retour échelonné à partir de 11h30. On imagine que pendant l’heure d’engagement, de multiples événements peuvent se dérouler: la restitution globale de la COMAO présente un intérêt évident pour le debriefing.
Bien que les avions ne soient pas munis de pod ACMI, l’insertion des données GPS de chaque aéronef permet quand même de restituer l’image globale des engagements.
Avec toute cette sophistication et ces standards OTAN, on imagine que le côté festif qui régnait au cours des éditions des années 60 et 70 du Tiger Meet s’est progressivement estompé au profit d’une forte valeur ajoutée pour l’entraînement opérationnel.
Mais l’esprit Tigre enveloppe cependant encore l’événement, lui conférant une ambiance plaisante malgré le travail intense… Et les jours de week-end sont des ‘no fly day’ !
Alexandre et escadrilles.org
Un grand merci au Capitaine de Vaisseau Pascal Cassan (commandant la base aéronavale de Landivisiau) et à l’équipe ‘communication’ réunie autour de l’Officier ALAVIA et de l’Officier Communication de la BAN de Landivisiau, pour un accueil parfait lors de la journée presse du 7 juin.